PATRICE

La salle du cinquième étage surplombe tout le campus universitaire, et Patrice est heureux de nous apprendre que le bâtiment et tous les fauteuils peuplant cette pièce font partie du patrimoine historique. Patrice s’installe dans un siège des années 70 ; il est prêt à parler de la loi de l’amour ou peut-être de l’amour de la loi.

Entouré de manuels de droit, de lexiques et de livres juridiques, Patrice cite les articles du Code Civil relatifs au mariage, sans même avoir besoin de feuilleter le gros pavé rouge ou bleu (selon les éditions). En tant que professeur de droit de la famille, Patrice connaît la loi sur le bout des doigts.

On a tenté de savoir pourquoi, en France, la loi devrait-elle régir ce qui n’est – au fond - qu’un sentiment. Il rétorque alors, en nous corrigeant presque, que jamais le Code Civil n’utilise le mot « amour » : les législateurs ne parlent que de « relations affectives ». Ils choisissent les mots avec soin, ainsi il est possible, et c’est tout à fait légal, de se marier sans amour. Patrice souligne, non sans sourire, que la loi impose pourtant aux époux de vivre ensemble, d’avoir des relations sexuelles et de s’entraider…

Patrice nous dit que le Code Civil contient énormément d’étrangetés de ce type. Il nous parle, par exemple, des mariages posthumes. En France, nous explique-t-il, il est possible de se marier avec un mort, si l’on peut prouver que feu ce dernier l’avait souhaité, et si le Président de la République émet un décret en ce sens. De même, le mariage entre un oncle et sa nièce par exemple, ou entre cousins, est parfois permis. Mais bien évidemment, ces unions restent très rares, puisque dans le Code Pénal, l’inceste est condamné.

On cherche aussi à savoir –sans doute pour répondre aux idées reçues - s’il est vrai que notre société est faite "d’adulescents" qui peinent à s’engager. Patrice répond que certes, les divorces ont augmenté, mais le nombre de mariages célébrés reste très stable. Aujourd'hui, on se marie par amour. Notre société ne semble pas avoir peur de l’engagement, sinon les couples resteraient des concubins.

Pour les formes, on demande alors à Patrice s’il croit au mariage. C’est un grand « oui » qui résonne dans la salle du cinquième étage.