GENEVIEVE & FRANCOIS

Cela fait six mois que Geneviève et François sont amoureux. À vrai dire, ils se sont plu très vite, dès que François est arrivé au « Moulin ». Ils se sont rencontrés lors d’une exposition organisée dans la résidence, ils étaient assis l’un à côté de l’autre au bar et le courant est passé. L’un et l’autre se sont trouvé gentils.

Geneviève, qui est presque aveugle, ne pouvait pas clairement voir à quoi ressemblait François, alors elle lui a touché le visage, pour essayer de comprendre ses traits. François nous répète qu’il a trouvé Geneviève tellement gentille qu’il l’a embrassée le jour même, de peur qu’elle ne se sauve.

Depuis lors, Geneviève et François ne se quittent plus. « Si l’on n’est pas ensemble, on se cherche », ajoute François en riant. Ils vivent dans des chambres séparées, puisque les éducateurs du « Moulin » pensent qu’il est encore trop tôt pour eux de partager un studio et aussi parce que tous les logements de couple sont actuellement occupés dans la résidence. François et Geneviève sont patients : ils passent leurs journées ensemble, c’est déjà très beau. Ils se retrouvent pour des activités, dans les espaces communs et dans la chambre de Geneviève, qu’elle accepte de nous montrer.

Elle mène la marche, suivie de François, un peu ralenti par ses béquilles. Elle ouvre la porte de sa chambre, une toute petite chambre pour un grand amour. Dans un coin trône un lit à une place seulement. Geneviève et François n’ont pas encore passé de nuit ensemble puisqu’ils n’ont chacun qu’un tout petit lit dans leur chambre respective.

François a promis au tuteur de Geneviève qu’il prendrait très soin d’elle. Il ne veut pas la lâcher, c’est quelque chose qui ne se fait pas, selon lui. Geneviève rit, et pose son visage sur l’épaule de François. Avec un geste tendre pour sa bien-aimée, François raconte qu’il se sentait très malheureux quand Geneviève était hospitalisée, il y a quelques mois. Il n’avait pas le droit d’aller la voir puisqu’elle était contagieuse ; il n’avait alors plus le goût de manger, privé de sa chérie. Le jour où Geneviève est revenue de l’hôpital, François en a été si ému qu’il s’est caché dans sa chambre pour verser une larme : il ne voulait pas qu’elle le voie pleurer, même de joie.

François sait qu’il doit se ménager, lui aussi, afin de pouvoir rester auprès de Geneviève le plus longtemps possible. Souffrant d’un problème aux hanches, François dit qu’il n’a pas le droit de tomber, sinon il devra lui-même retourner à l’hôpital.

François conclut cependant, dans un rire qu’il partage avec Geneviève, qu’il vaut mieux tomber amoureux que sur la hanche.

 L’histoire de Geneviève et François a été réalisée au foyer d’hébergement « Le Moulin », qui accueille des personnes handicapées mentales adultes.